L’excision bientôt interdite en Somalie ?

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Le Monde | Par Elise Barthet | le  28/03/2016

Image à la Une : Dans un camp de réfugiés à Baidoa, en Somalie, en 2013.

La tâche paraît impossible, et pourtant… à l’été 2015, la ministre est parvenue à convaincre les autres membres du gouvernement de soutenir un projet de loi en faveur d’une abolition partielle de l’excision. Seules les formes traditionnelles les plus sévères y étaient prohibées. Restait l’excision dite « sunna » ou « minimale », concentrée sur le clitoris. Sahra Ali Samatar espère aujourd’hui amender le texte en obtenant l’interdiction de toutes les formes de cette pratique. Il y a toutefois peu de chances que le projet de loi soit adopté par le Parlement avant l’élection présidentielle prévue dans le courant de l’année. « Après, c’est faisable, assure-t-elle. Même le ministre de la religion est pour ! »

La responsable mise beaucoup sur une prise de conscience des anciens membres de la diaspora aujourd’hui aux affaires. Le président du Parlement, le premier ministre et plusieurs membres du gouvernement qui ont étudié et travaillé à l’étranger pour fuir la guerre civile des années 1990 sont favorables à une interdiction. La pratique est d’ores et déjà moins visible dans les grandes villes. « A Mogadiscio, où j’ai grandi dans les années 1970, l’excision faisait l’objet de cérémonies qui duraient parfois une semaine. On en entendait parler dans le quartier. Des filles s’absentaient plusieurs jours de l’école et celles qui n’étaient pas coupées étaient connues. Leur famille faisait l’objet de pressions. C’est beaucoup plus discret aujourd’hui », assure Sahra Ali Samatar.

Lors des réunions organisées pour débattre du sujet, mères et grands-mères seraient également de plus en plus nombreuses à refuser d’opérer leur fille. « Beaucoup de celles qui l’ont fait se disent aujourd’hui résolues à épargner leurs petits-enfants », souligne la ministre. Elle-même s’est abstenue d’exciser sa fille et s’en félicite : « Lorsqu’elle a accouché aux Etats-Unis, j’ai pu constater à quel point la mise au monde était facile. Elle a donné naissance comme un chat. Alors que nous… »

« Effleure et n’abuse pas »

 

Les résistances sont toutefois nombreuses dans les rangs conservateurs. « Pour beaucoup d’hommes, l’excision reste une garantie de pureté, de virginité », rappelle Sahra Ali Samatar. Nombreux y voient également une prescription religieuse : si la circoncision des femmes n’apparaît pas dans le Coran, elle est explicitement mentionnée dans les hadiths ou dits du Prophète. « Effleure et n’abuse pas, car cela rend le visage plus rayonnant et est plus agréable pour le mari », aurait enjoint Mahomet à une exciseuse de Médine. Recommandation, obligation, simple conseil ? Les théologiens musulmans sont loin de s’accorder sur le caractère prescriptif de l’opération.

Amran Mahamood, exciseuse depuis une quinzaine d’années à Hargeisa, au Somaliland. 

 

Pour les partisans d’une interdiction totale, la nuance entre excision sunna et opérations sévères reste tout un non-sens. Dans tous les cas, il s’agit de mutilation. Les gynécologues américains qui ont fait polémique en février en défendant les interventions « minimales » dans le Journal of Medical Ethics sont « des criminels purs et simples », estime Edna Adan. Première sage-femme du Somaliland et ex-ministre des affaires étrangères de cette République indépendante autoproclamée du nord de la Somalie, la militante fait campagne depuis quarante ans contre l’excision. « Comment des médecins qui ont juré de protéger les êtres humains peuvent se dire aujourd’hui prêts à endommager le corps des femmes en bonne santé ? », s’insurge-t-elle.

L’infatigable Somalilandaise de 79 ans a fait construire à Hargeisa une clinique où elle forme de jeunes sages-femmes. Près de 97 % des femmes qui y ont accouché ont subi des mutilations génitales, selon elle, mais les infibulations, qui touchent encore les trois quarts des patientes, sont en déclin. Elles sont surtout pratiquées dans les zones rurales, dans des conditions d’hygiène souvent problématiques.

Pour faire évoluer les mentalités, la ministre somalienne Sahra Ali Samatar compte multiplier les rencontres sur le sujet réunissant hommes et femmes dans les villes et villages. Même si elle était adoptée, sa loi ne suffirait pas à faire refluer significativement l’excision dans un pays surtout préoccupé par les questions sécuritaires, reconnaît-elle. C’est un pari sur dix ans : « Il faudra qu’un jour tous les employés, les cheikhs, les commerçants aient été sensibilisés, que les dommages de l’excision soient évoqués dans les écoles, que le code pénal sanctionne durement ceux qui s’y livrent. »

Dix-huit Etats africains, dont le Nigeria en juin 2015, ont interdit définitivement les mutilations génitales féminines. Proscrite par le droit international, l’excision toucherait près de 200 millions de femmes dans la trentaine de pays d’Afrique et du Moyen-Orient où elle est couramment pratiquée.

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