«La réalité des violences sexuelles est l’objet d’un déni massif»

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L’Humanité des débats. Entretien avec Muriel Salmona présidente de l’association Mémoire Traumatique et Victimologie par Anna Musso en double page le 6 septembre 3013

 

Muriel Salmona : «La réalité des violences sexuelles est l’objet d’un déni massif»

 

http://www.humanite.fr/tribunes/muriel-salmona-la-realite-des-violences-sexuelles-548298

 

article de l'huma 6:9:13TRIBUNES L’Humanité–  le 6 Septembre 2013

 

 

 

Au moment où la ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, s’apprête à présenter un projet de loi-cadre pour l’égalité entre les femmes et les hommes au Parlement, Muriel Salmona, psychiatre-psychothérapeute, publie dans son dernier livre, des chiffres alarmants sur les violences faites aux femmes en France, et dénonce l’absence de prise en charge globale, médicale, sociale et judiciaire des victimes.

 

Dès l’introduction de votre Livre noir des violences sexuelles (1), vous précisez que les violences sexuelles sont en augmentation, et que les victimes sont à 80 % des femmes. Cette situation paraît aberrante dans notre pays, au XXIe siècle…

 

Muriel Salmona. Malheureusement, les chiffres sont catastrophiques. Toutes les enquêtes le montrent, les victimes sont issues de tous les milieux sociaux et de toutes les catégories professionnelles, et les violences sexuelles sont commises essentiellement par des hommes, par des proches ou quelqu’un de connu par la victime dans 80 % des cas. Malgré le Mouvement de libération des femmes (MLF) et les progrès en matière d’égalité ces quarante dernières années, nous sommes encore loin du compte concernant les violences, les discriminations et les inégalités subies par les femmes en France. Concernant les violences conjugales, 10 % des femmes en ont subi dans l’année écoulée ; pour les viols, les chiffres sont aussi effrayants : 75 000 femmes sont violées par an, et plus de 150 000 si l’on rajoute les mineures ! Une femme meurt tous les deux jours et demi sous les coups de son conjoint en France. Ces chiffres ne se sont pas améliorés, ils ont même augmenté. Nous vivons une réalité absolument impensable dans une société comme la nôtre.

 

Vous voulez dire que notre société se rend complice de ces violences, en n’écoutant pas assez les victimes et en ne les protégeant pas ?

 

Muriel Salmona. La réalité des violences sexuelles est l’objet d’un déni massif. Notre société se préoccupe peu des violences subies par les femmes et ne fait rien ou presque pour les dénoncer, poursuivre les agresseurs, ni aider les victimes ! De ce fait, il existe une loi du silence incroyable puisque moins de 8 % des femmes violées osent porter plainte : seuls 2 % des viols conjugaux et des violences sexuelles intrafamiliales font l’objet de plaintes. Et au final, ces plaintes aboutissent à seulement 1,5 à 2 % de condamnations en justice, et la plupart des viols sont transformés en agressions sexuelles ! La gravité de ce crime n’est pas réellement prise en compte dans notre société et l’impunité règne. De plus, les droits essentiels des victimes à la sécurité et aux soins ne sont pas respectés. Les femmes en danger bénéficient rarement d’une protection efficace. Une récente étude montre qu’en Île-de-France 67 % des femmes interrogées ont peur dans les transports en commun, dans leur quartier le soir, ou à leur domicile, contre 34 % des hommes.

 

http://www.humanite.fr/tribunes/muriel-salmona-la-realite-des-violences-sexuelles-548298

Source : Entretien avec Muriel Salmona dans l’Humanité du 6 septembre 2013 par Anna Musso : «La réalité des violences sexuelles est l’objet d’un déni massif».

6 réponses sur « «La réalité des violences sexuelles est l’objet d’un déni massif» »

Je suis aux prises avec un dossier de viol sur mineure qui a été correctionnalisé et pour lequel le TGI de Lille a jugé le « violeur » non coupable … alors qu’il a reconnu les faits !!! Il s’agit d’un monsieur qui a usé et abusé de son statut (directeur d’un centre sportif qui accueille ,entre autres, des jeunes filles) pour avoir des relations sexuelles avec plusieurs d’entre elles. Seule une plainte a été déposée : la mienne.
Je vais en appel en novembre et ne peux donc en raconter davantage pour le moment. Si quelqu’un, quelqu’une sait comment alerter la ministre des droits de la femme sur la manière dont la justice française traite les victimes de violences sexuelles et soutient les violeurs, je suis « preneuse » ! Pour info, l’auteur des faits n’a même pas eu une obligation de soins, alors qu’elle était préconisée par le médecin du centre hospitalier qui l’a vu durant sa garde à vue de quelques heures!).
Merci d’avance

Je vous remercie, je suis en lien avec SOS viol depuis plus d’un an. L’affaire a été correctionnalisée, apparemment je n’ai plus aucun recours, sauf à alerter les médias. Ce que je vais faire dès que l’appel aura eu lieu. Je cherche à porter efficacement sur la place publique (il n’y a pas eu d’enquête de gendarmerie, le tribunal a confondu 2 dossiers de victime, et j’en passe…). Je souhaite que l’on sache ce qu’est la justice (qui n’a de justice, que le nom) française et convaincre les victimes de ne pas accepter la correctionnalisation du viol. (En ce qui concerne l’affaire pour laquelle je me bats depuis 1 an et demai, gendarmerie, avocats, médecins… chacun a avancé des arguments ayant pour but de nous faire accepter la correctionnalisation). C’est pitoyable d’avoir pesé de la sorte sur la décision d’une mineure totalement ébranlée… Je n’aurais pas du accepter son choix, mais il est trop tard, le mal est fait.

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